Bien que bénéficiant d’un regain d’intérêt au sein des sciences sociales, les objets sportifs demeurent en marge des grands courants d’analyse. Ils sont pourtant des éléments constitutifs de l’action du pratiquant puisqu’il n’existe pas de technique, et a fortiori pas de technique sportive qui ne soit sous-tendue par des objets. Il paraît donc pertinent de concevoir l’expérience corporelle comme intriquée à la matérialité. Dans cette perspective, nous ambitionnons ici de questionner les relations étroites, complexes et pourtant consubstantiels que les sujets tissent avec les objets de leur pratique sportive au fil de leurs expériences et apprentissages. Cette ethnographie de l’élaboration des savoirs corporels en prise avec les objets nous conduit à envisager le corps et ses rapports polymorphes à la matière au prisme du processus d’incorporation. Notre contribution prend pour cadre théorique les approches de la culture matérielle (J.-P. Warnier, 1999) et de la praxéologie motrice (P. Parlebas, 1986), et s’appuie sur une étude réalisée auprès de sportifs et entraîneurs de clubs évoluant dans des activités distinctes comme la gymnastique rythmique, le kayak et le basket-ball, et étayée d’exemples issus d’une analyse des jeux de paume et de raquette.