Essai sur la genèse d’une œuvre : l’anthropologie réflexive et politique de Jean-Marie Brohm

Généralement, les commentateurs rapportent l’émergence de la critique radicale du sport de compétition à un contexte social, politique et culturel (Mai 68) et rappellent ses filiations théoriques (le freudo-marxisme). Cette approche s’apparente à une sociologie qui ramène les œuvres au contexte, soit dans la logique du reflet, soit dans celle des intérêts d’un groupe ou d’une classe sociale. Contrairement à cette lecture externe, le présent article cherche à mettre au jour le pouvoir constituant du travail sociologique de Jean-Marie Brohm, lequel se donne en tant que subjectivité, réflexivité et exploration des limites du pensable. Il s’agit donc de remonter au geste fondateur, de suivre le cheminement d’une pensée à la fois critique et clinique et d’en montrer l’originalité et la fécondité. Il s’agit par la même occasion de lever l’occultation implicite ou tacite du travail créateur et de ne pas laisser perdurer la méconnaissance d’une partie fondamentale de l’œuvre – méconnaissance liée à la structure du champ et à son mode de réception de la critique. Lorsqu’on examine l’ensemble des travaux de l’auteur, se dessine clairement une anthropologie philosophique qui n’a rien d’une entreprise d’érudition et ne doit rien à une posture contemplative. Son invariant est une pratique transformatrice du sujet de la connaissance et une critique des diverses formes d’aliénations.