L’objet de cet article est de montrer comment des jeunes garçons s’engagent dans une pratique sportive et artistique traditionnellement investie par les femmes, la gymnastique rythmique (GR), tout en se construisant une identité masculine. Les récits de cinq garçons âgés de 9 à 23 ans, ayant choisi de pratiquer un sport « féminin », nous renseignent sur la définition des contours de la masculinité dans notre société et les difficultés rencontrées par ces jeunes dans la construction de leur identité sexuée. L’analyse de la socialisation primaire de ces garçons montre que les hommes de la famille s’opposent à leur choix de pratique perturbant l’ordre de genre. La pression du groupe de pairs y est forte, ces derniers stigmatisant les pratiquants de GR en les étiquetant fréquemment d’homosexuels. Ces jeunes se sentent acceptés par leurs partenaires féminins d’entraînement, alors que leur intégration au sein des compétitions fédérales ne se fait que pour les plus compétents d’entre eux. Ils adoptent une définition non virile de leur masculinité et considèrent que les activités corporelles artistiques sont des pratiques féminines. Trois profils de pratiquants illustreront le « travail identitaire » qu’ils opèrent pour être considérés comme compétents en GR, tout en construisant leur identité sexuée.