La violence de l’impératif du bien-être. Bio-Autres, missions de sauvetage et justice sociale

Par Geneviève Rail
Français

Dans nos sociétés néolibérales, le « bien-être » est conçu de façon strictement individuelle. Il s’intègre dans un discours dominant et se nourrit de la biomédicalisation pour contribuer à une « biomoralité » violente à la fois sur les plans symbolique, physique et social. On fait appel aux technologies numériques pour renforcer le développement et le maintien du bien-être par l’autocontrôle, l’autodiagnostic et des méthodes skinnériennes pour apprendre à agir sur son propre bien-être. L’impératif du bien-être repousse l’engagement politique et conduit plutôt à la construction sociale d’un biocitoyen en forme, heureux et productif, ainsi qu’à celle de son opposé, le bio-Autre, un moins-que-citoyen en mauvaise forme physique, mal en point et improductif. Dans cet essai, je présente une analyse féministe et poststructuraliste qui s’intéresse aux discours et aux relations de pouvoir dans les sociétés occidentales contemporaines. Je présente ensuite une critique de la violence des interventions prétendument « humanitaires » pour sauver l’« abject » bio-Autre. Je discute des « missions de sauvetage » mal conçues dans le domaine de la santé publique. De telles missions exacerbent les divisions de classe et reproduisent des hiérarchies patriarcales et coloniales. Je m’interroge sur l’instrumentalisation des activités physiques et sportives dans le plan commercial global qui, au nom du bien-être, vise la conquête de nouveaux marchés. Je conclus l’essai par des réflexions sur la place de la sociologie du sport dans le projet plus vaste de justice et de bien-être social.

Mots-clés

  • bien-être
  • santé publique
  • classe
  • patriarcat
  • néolibéralisme
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